Nous traversons présentement une zone de turbulences

Par Sylvain B. Tremblay | 14 janvier 2019 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
4 minutes de lecture
Concept d'investisseurs observant, inquiets, les courbes d'un tableau boursier.
Photo : gopixa / 123RF

Prière de garder vos ceintures attachées jusqu’à ce que l’on éteigne la consigne de sécurité…  « Zone de turbulences » : le qualificatif est bien faible pour décrire l’état actuel des marchés. En octobre, la Bourse de New York a connu une baisse de 5,5 % en deux jours, suivie d’une hausse de 3,5 %, pour ensuite replonger de plus de 3 % et remonter de presque 2 %, sans compter les mouvements prononcés qui se sont poursuivis en novembre… Pendant ce temps, la Bourse de Toronto peine à suivre la remontée, mais encaisse presque toute la débâcle.

Comble de malheur, la hausse des taux fait bien mal paraître le marché obligataire, qui en prend pour son rhume, accumulant quelques reculs mensuels pour finir l’année en territoire négatif.  Mais que se passe-t-il? Serions-nous dans une situation similaire à celle de 2008? Il faut se rappeler qu’au cours de cette mémorable année, le marché obligataire avait tout de même réalisé un rendement impressionnant de plus de 10 %…

Une explication 

Mais d’où provient toute cette volatilité? Les marchés seraient en effet en train d’anticiper une récession mondiale. Nous nous retrouvons à la fin d’un cycle haussier qui dure depuis la crise de 2008. Ces périodes sont caractérisées par une hausse de la volatilité sur les différents marchés, engendrée par une plus grande nervosité chez l’investisseur devant l’incertitude quant à la durée éventuelle du présent cycle.

Un cycle financier d’une durée de 10 ans n’est cependant pas exceptionnel. On a qu’à se référer à celui de 1960 à 1970 ou, plus près de nous, celui de 1990 à 2000. Les plus vieux se souviendront très certainement de l’excès de volatilité des marchés en 2000 et, croyez-moi, ce phénomène n’était nullement attribuable au bogue de l’an 2000…

Phénomène à surveiller s’il en est un en pareille période : le rapport entre les taux à court terme et les taux à long terme. Les huit récessions répertoriées chez nos voisins du Sud depuis 1960 sont survenues immédiatement après l’inversement de la courbe des taux d’intérêt, les taux à court terme (trois mois) devenant supérieurs aux taux à plus long terme (10 ans). Lorsqu’on analyse ce rapport de plus près, on se rend bien compte que la tendance actuelle des taux d’intérêt pointe directement dans ce sens. L’éventualité d’une récession aux États-Unis n’est donc pas une lubie d’économiste, mais un scénario probable au cours des prochains mois.

Que faire?

Comment alors gérer ses avoirs en prenant en compte cette hypothèse? Ne surtout pas paniquer… Pour l’épargnant qui gère son portefeuille en respectant une politique de placement à long terme bien précise, il n’y a pas grand-chose à faire, à part constater l’évolution des marchés en dents de scie et rééquilibrer son portefeuille de temps à autre de façon à ramener ses positions près de leur cible.

Le gestionnaire de placement proactif, qui a anticipé à temps cette « zone de turbulences », aura préalablement pris ses profits sur ses titres américains et les aura placés sur le marché monétaire, le temps de laisser passer l’orage. Comme les marchés financiers ont tendance à rebondir rapidement, il ne faudrait cependant pas laisser « dormir » cette somme trop longtemps, au risque de manquer le train lorsque le marché reprendra de la vigueur (pensons à 2009).

En redéployant les liquidités ainsi obtenues, dans le marché canadien par exemple, le gestionnaire réalisera de très bons coups en achetant des titres à des prix à peine plus hauts que leur valeur comptable et qui versent d’excellents dividendes. Certains secteurs du S&P/TSX assurent une plus grande stabilité que les secteurs plus cycliques. Ceux de la consommation de base, des télécommunications ou des services financiers en sont de bons exemples. L’épargnant pourra s’y replier et percevoir de bons dividendes.

Mais gare à ne pas tomber dans la synchronisation de marché (market timing), approche qui relève plus de l’art ou de l’intuition que de la science… Il n’existe hélas pas de recette miracle en pareil contexte, sauf pour les détenteurs de la vérité absolue ou les utilisateurs de boule de cristal.

Sylvain B. Tremblay, ­Adm.A., ­Pl. Fin., est ­vice-président, ­Gestion privée à ­Optimum ­Gestion de placements.

Sylvain B. Tremblay