Des leçons de transparence à tirer des Bermudes

Par La rédaction | 6 mars 2017 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Alors que le Canada a caché, depuis 2008, l’identité de plus de la moitié des banques mises à l’amende par le Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada (CANAFE), les Bermudes, longtemps considérées comme un paradis fiscal, ne se gênent pas pour les dénoncer publiquement.

Le 27 février dernier, l’Autorité monétaire des Bermudes épinglait la Financière Sun Life pour cinq infractions aux lois du pays sur le blanchiment d’argent, révèle le Toronto Star. Non contente de lui avoir infligé une amende de deux millions de dollars, la plus importante de l’histoire de l’île, elle s’est aussi assurée que le grand public en prenne connaissance.

LE CANADA BEAUCOUP PLUS DISCRET

Cela est conforme à une politique des Bermudes instaurée l’an dernier et visant à augmenter la transparence dans la petite île caribéenne afin de protéger sa réputation. Un virage que tarde à prendre le Canada, comme l’a démontré l’affaire Manuvie. En avril 2016, le CANAFE a imposé une amende de 1,15 million de dollars à une banque pour avoir omis de rendre compte d’une transaction suspecte et de divers transferts d’argent. Il a toutefois fallu dix mois pour que l’on sache que cette banque était la Financière Manuvie.

Pour justifier ce manque de transparence, le directeur du CANAFE, Gérald Cossette, a invoqué par voie de communiqué la semaine dernière le fait que les violations étaient de nature technique et n’avaient rien à voir avec le blanchiment d’argent ou le financement du terrorisme. Du même souffle, il a admis que cette approche avait « peut-être été à l’encontre des attentes du public en matière d’ouverture et de transparence ».

Renée Bercier, une autre porte-parole du CANAFE, a aussi souligné à Conseiller en 2016 que dévoiler ou non les noms des fautifs relevait d’un « droit discrétionnaire » du CANAFE. « Dans ce cas-ci, cette approche sert mieux l’intérêt du régime plus vaste de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement des activités terroristes », disait-elle, ajoutant qu’elle envoyait un message de dissuasion suffisant.

VERS PLUS DE TRANSPARENCE?

Le CANAFE pourrait revoir sa politique de divulgation des noms des banques fautives, a cependant annoncé M. Cossette. Pas une mauvaise idée, affirme l’avocate canadienne Christine Duhaime, experte des mesures contre le blanchiment d’argent, au Toronto Star. « Le public canadien est très remonté et souhaite que les gens aillent en prison pour des crimes financiers comme l’évasion fiscale, croit-elle. Mais il n’y a pas la même volonté de contrer les crimes en col blanc du côté du gouvernement. Il y a une réelle déconnexion. »

Quant à la Financière Sun Life International, son PDG Niall O’Hare soutient coopérer pleinement avec l’Autorité monétaire des Bermudes et avoir déjà accepté d’effectuer les contrôles appropriés pour s’assurer d’être en conformité avec les règles de cette juridiction.

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