Endettement : les ménages québécois s’en sortent plutôt bien

Par Rémi Maillard | 9 avril 2015 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Le niveau d’endettement des Québécois a progressé « beaucoup plus vite » que leurs revenus au cours des dernières années, mais leur situation est « moins préoccupante » que celle des autres Canadiens, selon une étude publiée mardi par Desjardins.

Dans ce document, le Mouvement rappelle en effet que le taux d’endettement des ménages (le total des dettes des particuliers par rapport au revenu personnel après impôts) dans la Belle Province, qui est de 146 %, demeure nettement inférieur à ceux du reste du Canada (163 %), et spécialement de l’Ontario (170 %).

Bien que les revenus des ménages soient inférieurs au Québec, cet écart serait en grande partie dû à la valeur plus élevée des résidences chez nos voisins de l’Ouest et, d’une manière générale, dans l’ensemble du pays, affirme Hélène Bégin, économiste principale chez Desjardins Études économiques.

Le poids de la dette hypothécaire

Selon elle, « l’ascension de la valeur des résidences ainsi que la hausse du taux de propriété ont gonflé les dettes hypothécaires contractées par les ménages, ce qui semble avoir alourdi le poids de leurs emprunts ». Ainsi, l’an dernier, le prix moyen d’une propriété était d’environ 270 000 dollars au Québec, comparativement à 430 000 dollars en Ontario et à 410 000 dollars au Canada.

« Étant donné que l’encours des dettes hypothécaires domine les autres types de dettes, tels que les marges de crédit, les prêts à la consommation et les soldes des cartes de crédit, il s’agit de l’élément qui influence le plus le taux d’endettement », précise l’économiste.

Toutefois, estime-t-elle, le pourcentage élevé de ce ratio d’endettement, « qui semble à première vue inconfortable », n’est pas forcément représentatif de la situation réelle des ménages québécois, car il faut aussi tenir compte de l’importance des paiements mensuels dans leur budget.

70 000 dollars de dettes en moyenne

Or, constate Hélène Bégin, « bien que les dettes continuent de grimper plus rapidement que les revenus, la faiblesse des taux d’intérêt permet de maintenir le poids des paiements mensuels des ménages à un niveau raisonnable. »

« L’importance des emprunteurs à risque de ne pas s’acquitter de leurs obligations financières est demeurée assez stable depuis 10 ans », relève-t-elle par ailleurs, même si, dans le même temps, « la capacité de faire face à un événement qui entraîne une baisse de revenus, comme une perte d’emploi ou une maladie grave, a diminué. »

D’après les données de l’enquête Canadian Financial Monitor d’Ipsos Reid, reprise dans l’étude de Desjardins, les dettes des ménages s’élèvent, en moyenne, à 70 000 dollars, tandis que leurs actifs représentent près de 280 000 dollars.

Allongement des délais de vente

« Depuis 10 ans, la forte progression des dettes s’est appuyée sur une hausse soutenue de la valeur des actifs, principalement composée de propriétés immobilières, explique Hélène Bégin, qui observe que si « les résidences peuvent servir de fonds de dernier recours, les délais de vente se sont toutefois allongés depuis quelques années ».

En effet, compte tenu du ralentissement du marché de l’habitation, une moyenne de 112 jours était nécessaire pour vendre une maison unifamiliale au Québec l’an dernier, et de 130 jours pour une copropriété.

« L’accès au capital n’est donc pas instantané en cas de difficultés financières », note l’économiste, même si « la valeur des actifs immobiliers a cependant l’avantage d’être assez stable, contrairement aux actifs financiers qui fluctuent en fonction des marchés boursiers ».

Sa conclusion? « La capacité financière des ménages [québécois] de rembourser leurs dettes est demeurée stable au fil des ans, tout comme le risque de défaut de paiement. »

Gare à une éventuelle remontée des taux!

Cependant, met-elle en garde, « le bas taux d’épargne ainsi que l’allongement de la période du chômage rendent les ménages plus vulnérables à une remontée éventuelle des taux d’intérêt » et leur situation financière, « qui semble sous contrôle pour l’instant », pourrait « évoluer rapidement », entraînant une hausse des défauts de paiement et du nombre de faillites personnelles.

Pour éviter d’en arriver là, Hélène Bégin conseille donc aux familles de profiter du fait que « la remontée des taux d’intérêt semble en veilleuse pour quelques trimestres » pour assainir leur bilan financier.

« Si les plus fragiles profitent de cette période de sursis pour réduire leur niveau à l’endettement, croit-elle, leurs difficultés en seront amoindries. »

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Rémi Maillard

Journaliste multimédia. Santé, environnement, société, finances personnelles. Également intéressé par les affaires publiques, les relations internationales, la culture… Passionné de cyclisme.