La Banque Laurentienne dans une mauvaise passe?

Par La rédaction | 8 juin 2020 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
4 minutes de lecture
Banque Laurentienne
Photo : dennizn / 123RF

La Banque Laurentienne, qui poursuit sa politique de rationalisation en fermant de nombreuses succursales, vient d’annoncer une réduction de son dividende, « fait rarissime » au pays, rapporte La Presse.

Dans une entrevue accordée lundi au quotidien montréalais, le président-directeur général de la septième banque en importance au pays précise les conditions dans lesquelles la restructuration de l’entreprise s’effectuera, sur fond de pandémie. François Desjardins affirme que la récente décision de réduire le dividende était « la bonne chose à faire ».

« La banque célèbre ses 175 ans d’existence. Ce n’est pas en faisant des niaiseries ou en prenant des décisions autres que par prudence qu’on est devenu une des plus vieilles organisations au pays. Mais voyant ce qui se présente devant nous [la COVID-19], c’est important en tant que chef d’entreprise d’agir prudemment lorsqu’il y a de l’incertitude. Réduire le dividende pendant la pandémie pour s’assurer de pouvoir le bonifier quand les résultats augmenteront est une chose prudente. Nous ne sommes pas les seuls à le faire. En Europe, dès le début de la pandémie, les autorités gouvernementales ont demandé aux banques de couper leur dividende au complet. HSBC Canada a aussi coupé son dividende au complet. »

STABILITÉ À VENIR?

François Desjardins indique assumer pleinement son plan de transformation initié en 2016, basé sur le développement des services numériques et la fermeture de nombreuses succursales.

« Évidemment, c’est beaucoup d’investissement. Être la plus grande banque au Canada à avoir un nouveau système bancaire l’année prochaine nous donnera un avantage concurrentiel très important. Les autres banques devront le faire. […] Chaque fois que quelqu’un fait quelque chose de différent, il y a toujours des critiques. Il faut avoir assez de caractère pour prendre des décisions logiques qui vont amener l’organisation ailleurs », assène-t-il.

D’après le dirigeant, cette stratégie sera d’autant plus payante que la pandémie de COVID-19 pourrait modifier encore plus rapidement que prévu les habitudes des clients des institutions financières au pays. « On était toujours derrière les autres auparavant. Aujourd’hui, plein d’entreprises [refusent l’argent comptant]. J’ai été critiqué quand on a fait ça il y a 18 mois. C’est un avantage pour la banque et nos clients dans un environnement de pandémie d’avoir déjà fait ça. Nous étions déjà habitués. »

L’établissement qu’il dirige « rate régulièrement la cible des analystes » et « plus aucun d’entre eux » ne recommande d’ailleurs d’acheter son action, souligne cependant La Presse.

« Il n’y a aucune autre banque en transformation de la même façon que la nôtre. Les analystes fonctionnent avec des modèles. Ils regardent ce qui augmente et ce qui diminue chaque trimestre. Malheureusement, en raison des règles, il est interdit de leur dire ce qui va se passer. Je n’ai pas le droit. Je peux dire ce qui vient de se passer. Je peux révéler les grandes stratégies. S’ils se trompent dans leurs évaluations, il n’y a pas grand-chose que je peux faire. J’ai dit dès le départ qu’il y aurait des hauts et des bas. […] Les résultats seront plus stables après la transformation. »

« S’ADAPTER OU MOURIR COMME LES DINOSAURES »

L’attitude réservée des analystes vient aussi du fait que « dans le secteur financier, si tu fais quelque chose de différent, on se dit par défaut que quelque chose cloche, alors que dans d’autres secteurs, comme les technologies, par exemple, si tu n’es pas en train d’innover, c’est là que des questions sont soulevées », croit le PDG.

« Qu’on le veuille ou non, le secteur bancaire ne peut rester comme il est. Les géants technologiques s’en viennent. Les clients peuvent se tourner vers des banques numériques ou d’autres services parce qu’ils sont moins chers et plus conviviaux. Si on ne s’adapte pas, on va mourir comme les dinosaures », résume-t-il.

La Banque Laurentienne a prévu la disparition de plus de la moitié de ses succursales (150 agences en 2016, comparativement à une soixantaine à la fin de cette année). François Desjardins se montre évasif sur la configuration idéale qui devrait être adoptée.

« Le nombre optimal qu’on doit viser pour le futur est le nombre de conseillers [en services] financiers. Ce sont eux qui font le travail. Une bâtisse avec un toit et une pancarte ne fait absolument rien pour le client. Le service est donné par les gens à l’intérieur. On vient de franchir la barre des 400 conseillers, en hausse d’une cinquantaine depuis l’année dernière, et en hausse d’une centaine depuis le lancement du plan de transformation. Et ça va continuer ainsi. »

Sa conclusion? « Nous avons moins de lieux physiques, mais de plus grands sites, avec plus de monde sur ces sites. Et on a des conseillers qui, techniquement, vont voir les clients. Le nombre de succursales devient de moins en moins important dans la vie des gens. On évalue constamment ce qui est mieux, la fin des baux, etc. »

La rédaction