Le CELI favoriserait effectivement les plus riches

Par La rédaction | 2 juillet 2015 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Les personnes disposant de revenus faibles ou moyens ont moins profité du compte d’épargne libre d’impôt (CELI) que ne l’affirme le gouvernement fédéral, selon une étude publiée en début de semaine par l’Institut Broadbent.

Établie à partir de statistiques non publiées de l’Agence du revenu du Canada obtenues grâce à la loi sur l’accès à l’information, celle-ci a été menée par le chercheur Jonathan Rhys Kesselman.

Ce spécialiste en finances publiques à l’école de politique publique de l’Université Simon Fraser, en Colombie-Britannique, est aussi l’un des experts à l’origine du concept de CELI.

PRENDRE LES BONS CHIFFRES

Son constat? Si le gouvernement assure que près de 60 % des détenteurs d’un CELI y ayant déposé le maximum en 2013 avaient des revenus de moins de 60 000 dollars, il « oublie » de préciser que moins de deux Canadiens admissibles sur cinq ont utilisé cet outil d’épargne cette année-là, tandis que 62 % des personnes admissibles n’en avaient même pas ouvert un.

« Il est essentiel d’établir la distinction entre les détenteurs de CELI et les personnes admissibles au CELI pour évaluer la performance du programme, et cette distinction est ignorée dans beaucoup de commentaires », souligne l’étude.

Or, les chiffres montrent que seule une personne admissible sur 15, soit 6,7 %, avait contribué au maximum à son compte en 2013. Et au début de 2015, cette proportion aurait été plus petite encore, précise le rapport.

Celui-ci indique également que les avantages du passage à 10 000 dollars du plafond annuel des cotisations « seront concentrés en fait chez les personnes bien nanties et plus âgées ».

« DÉPLACEMENT DES AVOIRS »

Par ailleurs, « même les importants gains relatifs chez les retraités se sont avérés un effet transitoire qui diminuera dans les années à venir, car les personnes âgées semblent surtout transférer leurs avoirs imposables dans un CELI afin de diminuer leur impôt sur le revenu et d’augmenter les avantages du régime de retraite public, plutôt que pour augmenter leur épargne ».

Enfin, comme le transfert d’argent est permis entre membres d’une même famille aux fins de cotiser à un compte, et qu’il n’est soumis à aucun impôt, « les CELI sont utilisés pour fractionner le revenu entre les conjoints et autres membres de la famille qui en ont les moyens ».

Conclusion de l’étude : « La diminution marquée du nombre de gens cotisant le maximum au CELI dans tous les groupes d’âge et de revenu prouve que l’augmentation du plafond suscitera assez peu de nouvelle épargne; elle fait plutôt penser à un déplacement des avoirs et à un fractionnement du revenu par les Canadiens mieux nantis, qui possèdent les avoirs les plus imposables. »

UNE MESURE COÛTEUSE

Dans un rapport sur cette question déposé au mois de février, le directeur parlementaire du budget, Jean-Denis Fréchette, avait estimé que d’ici 2060, les ménages à patrimoine élevé retireraient de ce programme des gains 10 fois plus élevés que les familles à faibles revenus.

Il avait également calculé que le doublement du plafond du compte d’épargne libre d’impôt entraînerait dès 2020 des pertes fiscales de deux milliards par an au fédéral et d’un milliard pour les provinces, puis respectivement de six et de trois milliards à l’horizon 2040.

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