Le risque climatique en Bourse se confirme

Par La rédaction | 18 février 2019 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Terre brisée en morceaux.
Photo : Daniil Peshkov / 123RF

La récente faillite de Pacific Gas & Electric Company (PG&E), l’Hydro-Québec californien, montre que les changements climatiques risquent de faire des victimes en Bourse. Les investisseurs ne peuvent y rester insensibles, soutient un article publié dans le quotidien économique français Les Echos.

L’échec de PG&E représente la plus grosse faillite depuis celle de Lehman Brothers. L’entreprise de San Francisco fournit 16 millions de foyers en électricité. Elle avait acquis une réputation peu enviable au début des années 2000 en raison de la sortie du film Erin Brockovich. Ce film raconte l’histoire vraie d’Erin Brokovich, jouée par Julia Roberts, qui a institué dans les années 1990 une poursuite contre PG&E, accusée d’avoir caché un problème de déversement de chrome hexavalent dans les eaux potables à Hinkley. Cet incident avait entraîné de graves maladies pour un bon nombre de résidents. PG&E s’était vu condamnée à payer 333 millions de dollars américains (441,7 M$ CA) en dommages après avoir été reconnue coupable.

DE COÛTEUSES ÉTINCELLES

Ses plus récents malheurs ont débuté en novembre dernier, lorsqu’elle a été pointée du doigt comme responsable du violent incendie Camp Fire, qui a détruit 14 000 maisons et tué 86 personnes dans la bien mal nommée ville de Paradise. Un pylône à haute tension de PG&E, situé au milieu de la zone de l’incendie, est soupçonné d’avoir causé l’embrasement. Selon une enquête, une attache défaillante aurait pu laisser une ligne de 115 000 volts toucher le pylône métallique, provoquant des étincelles qui auraient enflammé la végétation. 

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L’hypothèse n’a pas été confirmée, mais aux yeux de la loi californienne, celui qui a déclenché l’incendie est reconnu responsable en matière civile, sans égard à la commission de fautes ou de négligences. Les poursuites civiles n’ont pas tardé et la société estime qu’on lui réclame 30 milliards de dollars américains de dédommagement (39,8 G$ CA). C’est trop pour PG&E, qui se place à l’abri de ses créanciers sous la protection du « chapitre 11 ». Sa directrice générale quitte ses fonctions. PG&E avait aussi été mise en cause dans 17 incendies survenus en 2017.

CONDITIONS DIFFICILES

On peut certes y voir la preuve que la gouvernance de l’entreprise a négligé son rôle de protection de la sécurité publique. Mais Les Echos vont plus loin, en rappelant que ce sont peut-être les niveaux de risque qui ont augmenté, en raison des changements climatiques.

À l’ouest des États-Unis, le réchauffement des dernières années aurait réduit l’accumulation du manteau neigeux durant les hivers froids et humides. Le printemps surviendrait aussi plus tôt. Les étés sont plus secs et plus longs. On y retrouve davantage de sols et de végétation asséchés, qui agissent comme carburant des incendies, alimentés aussi par les vents automnaux qui poussent de l’air chaud vers la Californie. Selon Swiss Re, la durée des gros incendies est passée d’une moyenne de six jours entre 1973 et 1982 à plus de 50 aujourd’hui.

Le coût total des incendies en Californie augmente en parallèle avec leur fréquence et leur intensité. Il aurait déjà dépassé 14 milliards de dollars américains (18,6 M$ CA) en 2017. PG&E est leur première victime boursière, ce qui devrait alerter les marchés. Les investisseurs et les gestionnaires devraient mieux tenir compte des risques climatiques, car ceux-ci peuvent affecter la vie des entreprises, voire les faire disparaître. 

DES MESURES CONCRÈTES

Les Echos rappellent qu’aux États-Unis, la candidate aux primaires démocrates Elizabeth Warren propose que l’on contraigne tous les groupes cotés en Bourse à indiquer dans leur rapport annuel comment le changement climatique peut affecter leur valeur à long terme. Le quotidien français rappelle qu’il existe aussi d’autres avenues. Les banquiers ne doivent plus prêter aux industries les plus polluantes, mais plutôt financer les énergies renouvelables. Les gestionnaires de fonds doivent encourager les entreprises dans lesquelles ils investissent à réduire leur empreinte carbone, quitte à exclure les plus mauvais élèves de leurs portefeuilles. Ils peuvent aussi pousser les dirigeants à lier leurs salaires à des objectifs précis de réduction des émissions de CO2. 

Au Québec, en septembre dernier, le Fonds de solidarité de la FTQ s’engageait à réduire d’au moins 25 % l’empreinte carbone de ses investissements boursiers d’ici 2025. Il diminuera aussi son empreinte dans ses investissements privés. La Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ), qui gère plus de 310 milliards, promet d’augmenter de 50 % ses investissements sobres en carbone d’ici 2020 et de réduire de 25 % ses émissions de GES par dollar investi d’ici 2025. Les facteurs climatiques seront désormais pris en compte dans chacune de ses décisions d’investissement.

Les facteurs climatiques ou l’environnement comptent-ils dans vos décisions d’investissement ou dans le choix des produits que vous proposez à vos clients?

La rédaction