Les marchés restent calmes après l’élection de Trump

Par La rédaction | 9 novembre 2016 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Les marchés, qui misaient sur un succès d’Hillary Clinton, n’ont pour l’instant pas été ébranlés par la victoire surprise de Donald Trump à l’élection présidentielle aux États-Unis, rapporte La Presse Canadienne.

Ainsi, la Bourse de Toronto a grimpé en fin de matinée, les investisseurs semblant s’ajuster aux événements. L’indice composé S&P/TSX du parquet torontois a pris 80,40 points à 14 737,24 points, soutenu par les gains des secteurs des matériaux. Le dollar canadien a cependant baissé de 0,78 cent à 74,38 cents US.

De son côté, l’indice Dow Jones a gagné 42,12 points, soit 0,23 %, à 18 374,86 après 20 minutes de cotations. Le Standard & Poor’s 500 a quant à lui pris 0,10 %, à 2 141,80, tandis que le NASDAQ Composite avançait de 0,06 %, à 5 196,77.

DISCOURS CONCILIANT DE DONALD TRUMP

Si les marchés américains n’ont pas adopté de direction claire après près de deux heures de transactions, les variations des principaux indices ont toutefois été beaucoup moins importantes que celles observées durant la nuit par les contrats à terme. Rassurées par la réaction de Wall Street, les Bourses européennes, elles, ont effacé leurs pertes de la matinée et sont reparties à la hausse.

La réaction plutôt calme des marchés nord-américains a défié les pronostics des analystes, qui s’attendaient plutôt à une volatilité extrême en cas de victoire du candidat républicain, souligne La Presse Canadienne. Selon les observateurs, l’absence de panique est due au ton plutôt conciliant et rassembleur adopté par le président nouvellement élu dans son premier discours d’après-victoire.

« Je voudrais dire à la communauté mondiale que même si nous allons toujours voir d’abord aux intérêts des États-Unis, nous allons être justes avec tout le monde. Avec tout le monde. Tous les gens et toutes les autres nations. Nous allons rechercher un terrain d’entente, pas l’hostilité. Un partenariat, pas un conflit », a notamment déclaré le nouveau président dans son discours.

Cette modération, qui n’était jusqu’alors pas le fort du candidat Trump, semble avoir rassuré les investisseurs, ainsi qu’en témoigne l’indice CBOE (Chicago Board Options Exchange) de la volatilité, surnommé « indice de la peur » sur les marchés américains, qui a reculé de 17 % après s’être envolé de près de 40 % juste après l’annonce des résultats de l’élection.

LES VALEURS PHARMACEUTIQUES EN HAUSSE

Selon l’analyste Michael Hewson, de la firme CMC Markets, « la réaction beaucoup plus modérée » des marchés s’explique aussi probablement par le fait qu’ils se doutaient depuis quelque temps déjà que les sondeurs se trompaient peut-être et qu’une victoire de Donald Trump était possible.

Tous les secteurs d’activité ne réagissent cependant pas de la même façon de l’autre côté de la frontière. Les valeurs du secteur pharmaceutique, par exemple, ont enregistré de nets gains en raison de la défaite d’Hillary Clinton, qui prônait un durcissement de la réglementation en matière de prix des médicaments.

En revanche, certains constructeurs automobiles, comme General Motors et Ford, ont perdu des plumes, car le discours protectionniste de Donald Trump cible particulièrement le Mexique, où sont implantées plusieurs usines d’assemblage de véhicules.

MOINS DE RISQUE D’UN RELÈVEMENT DES TAUX

Parmi les « gagnants » de l’élection du candidat républicain à la Maison-Blanche, les experts de BMI, un cabinet lié à l’agence de notation Fitch, citent les secteurs des infrastructures, que Donald Trump entend développer de manière importante, du pétrole et de l’énergie, puisqu’il prévoit réduire les régulations environnementales, ainsi que celui de la défense, rapporte l’Agence France-Presse.

L’AFP note que la victoire républicaine réduit considérablement le risque d’un relèvement des taux par la Réserve fédérale le mois prochain. Toutefois, la situation à long terme est plus incertaine puisque Donald Trump est partisan d’un moindre soutien de la Fed à l’économie américaine, « ce qui supposerait donc de régulières hausses des taux » ainsi que le non-renouvellement du mandat de sa présidente, Janet Yellen, au début de 2018.

En fin de compte, le terme qui domine chez les analystes est « l’incertitude » que représente la future présidence Trump, et ce, d’autant plus qu’« il est difficile de déterminer à quel point il pourra bénéficier du soutien de son propre parti républicain, sorti vainqueur des élections législatives mardi, mais méfiant sur bien des points du programme du futur chef d’État », conclut l’AFP.

… MAIS PLUS DE VOLATILITÉ SUR LES MARCHÉS

Dans un communiqué émis en milieu de matinée, la Caisse de dépôt et placement du Québec affirme que « les résultats des élections américaines augmentent le niveau d’incertitude dans l’économie mondiale ». Pour cette raison, « jusqu’à ce que les orientations économiques de l’administration de M. Trump se dessinent plus clairement, il faut s’attendre à plus de volatilité dans les marchés », ajoute-t-elle.

L’institution indique par ailleurs avoir l’intention de continuer d’« investir dans des actifs de grande qualité » dans tous ses portefeuilles. Cependant, prévient-elle, ceux-ci « seront affectés par les mouvements de marché », même si la qualité des actifs « contribuera à atténuer ces impacts ».

« Nous continuerons à suivre très attentivement l’évolution de la situation au cours des prochains mois », conclut la Caisse.

Interrogé par Conseiller, l’économiste principal du Mouvement Desjardins, Francis Généreux, estime de son côté que « la question qui se pose maintenant est de savoir ce que Donald Trump, une fois qu’il prendra ses fonctions le 20 janvier prochain, va vraiment vouloir faire, et quels sont les éléments de son programme qu’il décidera de mettre en vigueur ».

Mais pour l’instant, « nous ignorons encore quelles seront ses priorités, même si la majorité républicaine au Sénat et à la Chambre des représentants devrait l’aider à aller de l’avant », insiste l’économiste.

QU’ADVIENDRA-T-IL DE L’ALENA?

« On sait qu’il veut relancer l’économie américaine grâce à plusieurs mesures, notamment en baissant fortement les impôts des ménages et des entreprises, et en augmentant les investissements dans les infrastructures. Il compte aussi revoir à la baisse la réglementation et renégocier toute une série d’accords commerciaux internationaux. Pour le Canada et le Québec, c’est là que réside le principal risque à moyen et à long terme. »

En effet, relève Francis Généreux, « si le futur président va vraiment dans cette direction protectionniste, cela risque de causer des dommages à l’économie américaine et à l’économie mondiale, mais aussi au pays. C’est en particulier toute la question de l’Accord de libre-échange nord-américain ».

Cela dit, « tout au long de sa campagne, Donald Trump a très peu parlé du Canada et, quand il évoquait l’ALENA, il s’en prenait surtout au Mexique », rappelle-t-il.

Sa conclusion? « Au bout du compte, la principale source d’inquiétude, pour les économies canadienne et québécoise comme au niveau mondial, est qu’on assiste à un durcissement des relations internationales, notamment en matière d’accords commerciaux, car cela pourrait miner la croissance. »

GARE À TOUT REPLI COMMERCIAL

Pour sa part, la Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ) rappelle « l’importance de maintenir une solide relation commerciale entre le Canada et les États-Unis ».

« À la lumière des idées et valeurs protectionnistes qui ont été discutées dans le cadre de la campagne électorale américaine, nous entrons dans une période d’incertitude et d’inquiétude dans nos rapports commerciaux » avec nos voisins du Sud, déclare Stéphane Forget, PDG de la Fédération, dans un communiqué publié ce matin.

La FCCQ se dit également « préoccupée que le statut de nation exportatrice du Canada puisse être malmené par un repli commercial protectionniste exprimé par le président désigné des États-Unis au cours de la campagne électorale ». Et pour éviter que cela ne se produise, « elle entend travailler avec le gouvernement canadien à tout mettre en œuvre pour démontrer et promouvoir la valeur de nos ententes commerciales et de libre-échange avec les États-Unis ».

« Depuis l’entrée en vigueur de l’Accord de libre-échange nord-américain en 1994, nos exportations vers ce pays n’ont à peu près jamais cessé d’augmenter et se chiffrent à plus de 400 milliards de dollars, indique Stéphane Forget. Compte tenu de l’importance de ces échanges, il faut tout mettre en œuvre pour que notre principal partenaire commercial continue d’être ouvert et accessible. »

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