Les factures détaillées en pharmacie ont peu d’effet

Par La rédaction | 4 avril 2018 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Obligatoires depuis le mois de septembre, les factures détaillées en pharmacie ont eu peu d’effets sur les honoraires facturés par les pharmaciens et le comportement des consommateurs. Du moins pour le moment.

D’octobre 2017 à janvier 2018, les coûts relatifs par patient dans les sept principales chaînes de pharmacies du Québec n’ont pratiquement pas changé par rapport à la même période l’an dernier, alors que l’obligation de fournir des factures détaillées n’était pas en vigueur. Autrement dit, la loi 92 n’a pas incité les pharmaciens à réviser leurs prix, selon les données de l’actuaire Jacques L’Espérance présentées lors de la Conférence Telus Santé 2018.

« Les pharmacies les plus chères n’ont pas diminué leurs prix maintenant qu’elles connaissent ceux de leurs concurrents, et l’inverse est aussi vrai », a-t-il commenté.

Les consommateurs ne semblent pas non plus avoir davantage magasiné leurs médicaments et migrer en masse vers les pharmacies plus économiques. Par rapport à la même période l’année passée, aucune modification significative de la variation du nombre d’ordonnances traitées n’a été observée dans les grandes chaînes de pharmacies.

« Ce que l’on peut observer, c’est que la transparence des factures n’a pas eu d’impact sur les prix en pharmacie. Maintenant que les pharmaciens doivent aussi fournir des factures détaillées aux assureurs, les choses risquent de changer davantage », croit-il.

LES PRIX DES MÉDICAMENTS REPARTENT À LA HAUSSE

Alors que le coût moyen par réclamation avait pratiquement stagné en 2016 (0,14 %), il est reparti à la hausse en 2017. Selon les données des régimes surveillés par Telus Santé, le coût admissible par ordonnance a augmenté de 3,3 % au Québec l’année dernière, comparativement à 3,2 % dans l’ensemble du Canada et 3,0 % en Ontario. Au Québec, il a atteint 58,50 $.

Le coût mensuel admissible par assuré, qui se chiffre à 60,94 $, a pour sa part crû de 5,3 % par rapport à l’année précédente, tiré à la hausse par une augmentation de 1,9 % de l’utilisation mensuelle par assuré.

En ce qui concerne le taux d’utilisation des médicaments génériques, le Québec continue tranquillement de combler le fossé qui le sépare du reste du pays. En 2017, 60 % des réclamations concernaient des médicaments génériques dans la province, une hausse de 1 % par rapport à 2016. À titre comparatif, les génériques font l’objet de 63 % des réclamations en Ontario.

Au Québec, les autres réclamations concernent les médicaments uniques pour lesquels il n’existe aucun équivalent générique (31 %) et les médicaments originaux (9 %). Vu leur prix élevé, les médicaments uniques accaparent en revanche 66 % des coûts, comparativement à 27 % pour les génériques et 7 % pour les originaux.

L’utilisation accrue des génériques est intimement liée aux politiques de substitution des régimes d’assurance. Ainsi, en 2017, il n’y avait plus que 28 % des certificats qui se trouvaient dans des régimes sans aucune substitution générique, par rapport à 30 % dans des régimes avec substitution générique régulière et 42 % avec substitution générique obligatoire.

L’ÉCART PRIVÉ-PUBLIC CONTINUE DE SE CREUSER

Comparativement à leurs concitoyens couverts par le régime public de la RAMQ, les assurés des régimes privés continuent de payer plus cher lors de leur passage en pharmacie.

Alors que la réclamation moyenne dans les régimes surveillés par Telus Santé atteignait 58,50 $ en 2017, elle se chiffrait seulement à 37,77 $ dans le régime public. Par rapport à 2016, il s’agit d’une croissance des coûts de 3,3 % dans les régimes privés, contre seulement 1,9 % dans le régime de la RAMQ.

« En 10 ans, les coûts du privé ont augmenté de 27 % de plus que ceux de la RAMQ, indique Jacques L’Espérance. L’essentiel de l’écart est dû aux marges et honoraires subis par le secteur privé. À 16,92 $ par ordonnance, c’est le double de ceux du régime public. »

Lueur d’espoir pour les promoteurs de régime, Québec a négocié une baisse des prix allant de 3 à 72 % pour plus de 1800 médicaments génériques. « Le secteur privé a droit à ces baisses, mais pourra-t-il en profiter? » s’inquiète toutefois l’actuaire.

LES MÉDICAMENTS COÛTEUX DE PLUS EN PLUS COÛTEUX

Si l’ensemble des médicaments sur ordonnance connaissent une hausse rapide de leur prix, la tendance est encore plus marquée pour les médicaments de spécialité. Alors que ceux-ci ne faisaient l’objet que de 1 % des réclamations en 2017, ils accaparaient à eux seuls près de 30 % des coûts.

Au cours des neuf dernières années, le coût des médicaments de spécialité a augmenté de 15,9 % par an, alors que les médicaments dits « réguliers » ont enregistré une hausse de seulement 1,5 % par année durant la même période.

« À ce rythme, le poids des médicaments de spécialité aura dépassé celui des médicaments réguliers d’ici moins de six ans. Pendant ce temps, les coûts des régimes d’assurance auront bondi de près de 68 % », souligne Jacques L’Espérance.

La rédaction