Plus responsable, l’investissement au féminin ?

Par Anne-Marie Tremblay | 30 octobre 2023 | Dernière mise à jour le 24 octobre 2023
4 minutes de lecture
Femme analysant le marché.
Photo : GaudiLab / iStock

Alors que les femmes prennent de plus les rênes de leurs actifs, elles s’intéressent particulièrement à l’investissement responsable.

Si cette tendance de fond touche toutes les couches de la société, elle est plus marquée chez les femmes, indique Beatriz Barahona, conseillère principale en investissement responsable chez Desjardins. « Selon les sondages et les études que nous menons à l’interne, on remarque que les femmes seraient plus portées à opter pour l’investissement responsable que leurs homologues masculins, à 79% contre 74%. »

Le même constat s’observe du côté du plus récent sondage de l’Association pour l’investissement responsable publié en 2022. Selon cette étude, 67% des femmes se disaient très ou plutôt intéressées par cette façon de faire fructifier leur argent, contre 61% des hommes, cite la conseillère. « Si cette tendance est plus marquée chez les femmes, on voit quand même que cela intéresse une majorité de personnes et ce, peu importe leur sexe », nuance-t-elle toutefois.

L’INVESTISSEMENT COMME LEVIER

« Si on se place du point de vue des femmes, l’investissement responsable est un moyen pour elles de soutenir des causes auxquelles elles croient. Elles le voient comme un moyen de réaliser des objectifs financiers, mais aussi de contribuer à des changements dans la société », analyse Beatriz Barahona.  En effet, les femmes se disent plus sensibles aux enjeux environnementaux et sociaux qui sont vraiment au cœur de l’approche de l’investissement responsable, poursuit-elle.

Selon le Baromètre de l’action climatique 2022 de l’Université Laval, une plus grande proportion de femmes considère qu’il y a une urgence d’agir face aux changements climatiques, soit 91% contre 80% chez les hommes, mentionne la conseillère.

Le Baromètre montre aussi que les femmes ainsi que les personnes détenant un diplôme universitaire seraient plus exigeantes envers l’ensemble des acteurs susceptibles d’agir en lien avec la lutte aux changements et estiment qu’il faut en faire plus, poursuit-elle. « On remarque aussi la même tendance quant aux questions sociales. » L’investissement responsable peut donc devenir un outil intéressant pour faire avancer les choses.

Plus que théorique, ce type d’action peut avoir un effet réel sur la société, fait aussi valoir Beatriz Barahona. C’est le cas de certains fonds qui encouragent la diversité et le leadership au féminin qui génère beaucoup d’intérêt, donne-t-elle en exemple. « Ce type d’investissement incite les organisations à aller de l’avant, en adoptant ou en améliorant leurs pratiques environnementales, sociales et de gouvernance. Plus le message envoyé au marché est fort, plus ce type de comportement est encouragé au sein des entreprises et cela entraîne un effet boule de neige. Et les femmes ont un rôle important à jouer à ce chapitre. »

DES CAPITAUX QUI SE FÉMINISENT

C’est d’autant plus vrai que les femmes sont de plus en plus nombreuses à prendre le contrôle de leurs investissements, fait valoir Beatriz Barahona. « Il y a une évolution sociale et nous sommes plus conscients de l’effet de ces inégalités, de ces écarts qui continuent à exister. Cela s’explique entre autres par la surreprésentation des femmes dans les emplois à temps partiel ou parce qu’elles passent moins de temps sur le marché du travail », analyse-t-elle. Des différences qui se répercutent aussi sur leur portefeuilles.

Or, d’ici 2026, les Canadiennes contrôleront près de la moitié de tout ce qui a été accumulé comme patrimoine financier, montre une étude menée par Strategic Insight. C’est une hausse importante puisqu’il y a dix ans, les femmes détenaient plutôt le tiers de ces actifs, soutient le rapport. « On estime qu’autour de 900 G$ seront transférés aux femmes dans la prochaine décennie, entre autres par le biais d’héritages », détaille la conseillère.

« Je pense que le message qu’il faut retenir, c’est que les femmes doivent investir pour assurer leur sécurité financière », poursuit-elle. Se tourner vers des fonds plus responsables peut être un outil intéressant pour les inciter à le faire. « Tout compte fait, je pense que nous cherchons tous une cohérence entre nos valeurs, nos motivations et nos actions. Pouvoir investir en réalisant ses objectifs financiers tout en regardant comment la croissance dans le portefeuille est réalisée, c’est tout simplement cohérent. Et, les femmes accordent beaucoup d’importance à cet aspect. »

Des options d’autant plus intéressantes que, dans la majeure partie des cas, les fonds responsables enregistrent un rendement équivalent ou supérieur à celui de leur équivalent traditionnel, conclut une recherche ayant analysé plus de 1000 études menées entre 2015 et 2020. « Ce type d’investissement permet d’améliorer la gestion du risque et de mieux saisir les opportunités économiques d’une économie en transformation, en transition », résume Beatriz Barahona.

C’est d’ailleurs une option qui gagne en popularité d’année en année. Par exemple, Desjardins offre une cinquantaine de produits en investissement responsable. Un portefeuille qui comptait 12,4G$ d’actifs sous gestion en décembre 2022. Les actifs sous gestion du Fonds Desjardins SociéTerre sont quant à eux passés de 3,4 G$ en 2019 à 7,9 G$ au 30 juin 2023.

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Anne-Marie Tremblay

Anne-Marie Tremblay est journaliste indépendante.