Les coûts de santé inquiètent les retraités… avec raison

Par La rédaction | 19 mai 2016 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Près d’un Canadien sur cinq redoute de manquer d’argent quand il aura besoin de soins de santé durant sa retraite, tandis que deux sur cinq craignent de perdre leur capacité à vivre de façon autonome, concluait un rapport publié l’an dernier par l’Institut Info-Patrimoine BMO.

Intitulé Vous gagnez en sagesse avec l’âge, mais qui vous rattrapera si vous tombez?, ce document très fouillé indique aussi que près des trois quarts des sondés prévoyaient piger dans leur épargne personnelle pour assumer les frais en cas de longue maladie.

« Le coût élevé des soins peut aggraver l’anxiété que provoque déjà la nécessité d’apporter des changements majeurs à sa vie quotidienne », mettait alors en garde Chris Buttigieg, directeur principal, Stratégies de planification du patrimoine, chez BMO.

Bien que les retraités actuels et futurs craignent de ne pas pouvoir s’offrir les services à long terme requis en cas de perte d’autonomie, un sondé sur cinq admettait n’avoir pris aucune mesure financière en prévision d’une telle possibilité. Pourtant, selon Statistique Canada, la probabilité d’avoir besoin de soins de longue durée augmente avec l’âge, passant de 30 % avant 65 ans à 50 % avant 75 ans.

1) Les retraités canadiens se portent plutôt bien

Selon une étude mondiale publiée au début de l’année, les retraités canadiens sont plus nombreux que les personnes actives à choisir une bonne alimentation, à pratiquer des activités physiques et à se considérer en bonne santé (en anglais). La raison? Ils ont davantage de temps à consacrer à une vie saine. Résultat, les trois quarts d’entre eux (74 %) affirment qu’ils se nourrissent mieux qu’auparavant et plus de la moitié (55 %) se disent en bonne condition physique compte tenu de leur âge, contre des moyennes internationales de 70 % et 45 % respectivement.

Réalisé pour le compte de HSBC, le rapport Repartir du bon pied, présente le point de vue de plus de 18 000 personnes réparties dans 17 pays et territoires (Argentine, Australie, Brésil, Canada, Chine, Égypte, Émirats arabes unis, États-Unis, France, Hong Kong, Inde, Indonésie, Malaisie, Mexique, Royaume-Uni, Singapour et Taïwan).

Les dépenses en santé peuvent être considérables à la retraite. Pourtant, selon le rapport, les trois quarts (75 %) des personnes en âge de travailler au pays ignorent combien leur coûteront les soins de santé à la retraite. Une information importante, souligne HSBC, « dans la mesure où les Canadiens sont parmi les plus nombreux à dire que les médicaments d’ordonnance et en vente libre constituent une dépense non négligeable à la retraite » (68 %, contre une moyenne internationale de 45 %).

Le rapport détaille également de quelle façon les Canadiens à la retraite tentent de conserver la forme. Ainsi, 74 % des femmes lisent ou font des casse-tête (contre 55 % des hommes) et 61 % prennent des suppléments de vitamines (contre 38 % des hommes). De leur côté, 55 % des hommes disent éviter les excès, contre 33 % des femmes. Enfin, l’étude démontre que, par rapport aux non-retraités, les aînés sont plus nombreux à vouloir prévenir plutôt que guérir : 51 % prennent des médicaments d’ordonnance pour retarder l’apparition d’éventuels problèmes (contre 23 % des actifs), tandis que 43 % évitent de fumer ou de boire de l’alcool (contre 34 % des actifs).

2) Peu d’entre eux évaluent l’impact financier d’une maladie grave

Une étude de la Great-West publiée au mois de février révèle que plus de la moitié (55 %) des Canadiens seraient incapables d’assumer leurs frais de subsistance en cas de maladie grave, parce qu’ils n’ont jamais réellement envisagé cette hypothèse.

Cela prouve qu’il existe « un écart considérable entre la probabilité d’être touché par une maladie sérieuse et la planification de l’impact financier qu’aurait celle-ci sur la famille du malade », souligne la compagnie d’assurance. Sur la base d’un sondage mené par Head Research auprès de 1 786 Canadiens, la Great-West estime que plus de huit millions de personnes au pays risquent de s’endetter, de repousser l’âge du départ à la retraite ou d’avoir à déménager dans un logement plus petit pour survivre financièrement en cas de pépin de santé.

« Les Canadiens sont généralement mal à l’aise quand vient le temps d’envisager l’impact d’une maladie grave. Ils ont une certaine compréhension du risque, mais ne sont pas sensibilisés ni préparés à son impact financier », conclut la Great-West.

3) Pendant ce temps, le prix des médicaments augmente

Dans un rapport (en anglais) publié en janvier, Aon Hewitt estime que l’augmentation moyenne des coûts des régimes de soins médicaux parrainés dans le monde atteindra 9,1 % en 2016, soit un pourcentage deux fois et demie supérieur au taux d’inflation général de 3,6 % prévu à l’échelle mondiale.

Au Canada, le rapport suggère que la hausse moyenne des coûts pourrait atteindre 8 %, dépassant de 6 % le taux d’inflation anticipé, qui est de 2 %. Il s’agirait de la plus importante hausse des coûts médicaux depuis le milieu des années 2000, et elle surpasserait considérablement la moyenne nord‑américaine, qui devrait se situer à 5,8 %.

Cette hausse marquée des coûts est principalement due à la commercialisation de médicaments de spécialité pour traiter l’hépatite C, l’insuffisance cardiaque et certains types de cancers, précise Conseiller.ca. Les médicaments biologiques à coût élevé visant à traiter des pathologies plus courantes, comme l’hypercholestérolémie qui touche particulièrement les retraités, devraient aussi avoir une incidence majeure sur les coûts en 2016.

Selon Aon, les maladies qui font croître le plus les demandes de règlement dans le monde sont, dans l’ordre, les problèmes cardiovasculaires, les cancers et les troubles gastro-intestinaux. Au pays, les principaux facteurs de risque sont l’obésité, l’inactivité physique et le vieillissement.

4) Les médecins prescrivent-ils trop de pilules aux aînés?

Si l’on en croit l’Institut canadien d’information sur la santé (ICIS), près des deux tiers des personnes âgées au pays prenaient au moins cinq médicaments d’ordonnance en 2012, rapportait récemment la journaliste Anna Maria Tremonti sur CBC (séquence sonore en anglais). Les spécialistes du secteur appellent d’ailleurs à « réduire de moitié » d’ici à 2020 le nombre d’ordonnances prescrites aux aînés.

Utilisés massivement dans les maisons de retraite pour calmer l’anxiété des résidents, les antipsychotiques sont tout particulièrement visés par cet appel. Une diminution serait réaliste, puisqu’une étude de l’ICIS dévoilée en mars établit qu’au Manitoba, le recours à ce type de molécules a diminué, passant de 38 % en 2006 à 31,5 % en 2014. La raison de cette baisse? Depuis 2009, l’Office régional de la santé de Winnipeg a lancé un programme pilote (en anglais) visant à réduire l’utilisation inappropriée de ces médicaments dans les établissements de séjour de longue durée.

Autre problème soulevé par Radio-Canada en janvier : les aînés québécois ont de plus en plus de mal à obtenir de l’aide à domicile, spécialement dans l’île de Montréal. En effet, les budgets alloués à l’aide à domicile ont été amputés de près de 10 % depuis l’an dernier dans les établissements de santé de la métropole. Du fait de ces contractions budgétaires, des personnes âgées attendent « des semaines, parfois des mois » avant d’avoir accès à certains services.

Dans l’Ouest de l’île, Radio-Canada a calculé que les fonds destinés à financer ce type de prestations avaient diminué de 10 % cette année, « ce qui se traduit par 100 000 heures de services en moins » pour les patients en perte d’autonomie.

5) Les aidants naturels peuvent dépenser beaucoup d’argent

On dénombrait 4,5 millions d’aidants naturels âgés de plus de 45 ans au pays en 2012, soit une hausse de 20 % depuis 2007, selon une note de synthèse de l’Institut Info-Patrimoine BMO.

Or, souligne BMO, « les coûts liés à la prestation de soins à un proche peuvent être importants ». Parmi les « pressions financières » qui s’exercent sur les aidants, la banque mentionne les frais engagés pour « les fournitures, le matériel médical, les médicaments d’ordonnance, les appareils spécialisés et le transport ». Résultat : la majorité des aidants naturels dépensent jusqu’à 6 000 $ par an pour assumer leur rôle, et 17 % d’entre eux vont jusqu’à débourser de 6 000 à 24 000 $.

La plupart des aidants naturels subissent d’autres préjudices, observe BMO. « Le temps perdu en raison des absences ou de la réduction des heures de travail n’influe pas seulement sur le revenu net (…), mais réduit aussi les occasions de promotion, l’accès aux avantages sociaux et aux prestations de l’État, le potentiel d’épargne et les cotisations aux régimes de pension, et peut mener à une retraite anticipée forcée ».

La rédaction