Il se dit victime d’acharnement… et est mis à l’amende

Par La rédaction | 19 octobre 2016 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Le combat qui oppose depuis 10 ans Alan Murphy à l’Autorité des marchés financiers (AMF) se poursuit : l’ex-représentant en assurance de personnes et son co-accusé, Jean-François Chouinard, se sont en effet vu infliger des amendes totalisant 320 000 $ par la Cour du Québec, et ils ont décidé d’aller en appel.

Prononcée le 26 août, cette condamnation a été annoncée il y a seulement quelques jours par l’AMF, un délai « qui respecte le temps moyen que nous prenons pour produire un communiqué », a néanmoins précisé à Conseiller son porte-parole, Sylvain Théberge.

Il est reproché aux deux hommes d’avoir exercé de matière illégale la fonction de représentant en assurance de personnes. Le 22 avril dernier, ils ont été déclarés coupables de 80 chefs d’accusation portés contre eux par l’AMF dans une poursuite pénale intentée en 2012.

180 000 $ D’AMENDES POUR L’UN, 140 000 $ POUR L’AUTRE

Ancien conseiller et représentant en assurance vie dans la région de Québec, entré dans la profession en 1989, Alan Murphy a été déclaré coupable sous 20 chefs d’exercice illégal de l’activité de représentant en assurance de personnes et de 20 autres chefs pour avoir aidé à fournir des informations fausses ou trompeuses. Après avoir souligné ses antécédents et rappelé que les infractions qu’il avait commises s’étaient étalées sur plusieurs années, la Cour lui a imposé des amendes d’un montant total de 180 000 dollars.

De son côté, Jean-François Chouinard, inscrit auprès de l’AMF en tant que représentant en assurance de personnes au moment des faits, s’est vu condamné à payer des pénalités totalisant 140 000 dollars. Motif : il a aidé à 20 reprises son ex-collègue à pratiquer sans être inscrit auprès de l’Autorité, en plus d’avoir à ces différentes occasions fourni des informations fausses ou trompeuses dans le cadre d’activités régies par la Loi sur la distribution de produits et services financiers.

Les deux hommes ont décidé de porter ces jugements en appel devant la Cour supérieure du Québec et leur audition aura lieu le 23 novembre.

ALAN MURPHY VICTIME D’« ACHARNEMENT RÉGLEMENTAIRE »?

L’AMF rappelle qu’Alan Murphy a aussi écopé d’amendes totalisant 26 000 dollars en février 2011 après avoir été reconnu coupable d’avoir agi illégalement, cette fois à titre de courtier en épargne collective, à 26 reprises. Un jugement confirmé par la Cour supérieure après qu’il en eut fait appel.

Comme l’indiquait alors Conseiller, l’ex-représentant aujourd’hui âgé de 63 ans a également eu maille à partir avec la Chambre de la sécurité financière (CSF), qui l’a radié à vie en 2007 pour avoir commis des infractions en matière d’assurance de personnes. Toutefois, en 2008, la Cour d’appel a commué cette sanction en une radiation temporaire d’un an. À l’époque, le tribunal a en effet jugé que la radiation permanente prononcée contre lui était « sévère » et inappropriée compte tenu de la preuve présentée (voir l’encadré).

En février 2011, Alan Murphy a d’ailleurs publiquement dénoncé ce qu’il considérait être un manque d’objectivité de la part des autorités de contrôle financières, spécialement de l’AMF, dans un communiqué diffusé dans les médias. Il y déclarait notamment que les informations diffusées par l’Autorité le concernant ne répondaient pas « aux standards d’objectivité qui s’imposent normalement à un organisme public » et il affirmait être victime « d’acharnement réglementaire ».

Que disait le jugement de 2008?

Dans un jugement de la Cour du Québec daté du 6 juin 2008 que s’est procuré Conseiller, certains passages mettent en cause l’attitude du comité de discipline de la CSF. On y lit notamment que « dans le cas présent […] le comité de discipline a voulu sanctionner définitivement l’appelant [Alan Murphy] à l’étape ultime du processus disciplinaire non pas en le sanctionnant objectivement mais en lui imposant la radiation permanente, c’est-à-dire ni plus ni moins l’exécution capitale sur le plan professionnel ».

« L’imposition d’une sanction disciplinaire qui se transforme en un processus de punition constitue une erreur de droit. Alors que la réhabilitation est le premier objectif de cette étape cruciale du processus, […] on peut se demander […] comment la décision du comité de discipline sauvegarde l’objectif premier de bien protéger le public lorsqu’on constate en l’espèce les longs délais de délibéré qui ont précédé les deux décisions et l’absence de requête demandant la radiation provisoire du professionnel », est-il également écrit.

« ON DÉVIE DE L’OBJECTIF DE PROTECTION DU PUBLIC »

« La façon dont le comité a justifié sa décision de radier de façon permanente l’appelant est-elle acceptable à la raison? […] L’imposition de la sanction la plus sévère qu’il soit et le montant substantiel des amendes constituent-ils, dans les circonstances, des issues possibles acceptables? […] À toutes ces questions, nous répondons négativement. »

« Cette décision dévie de l’objectif de protection du public et empêche définitivement l’appelant d’exercer sa profession. […] Au surplus […] il faut remarquer que le comité de discipline ne justifie nullement pourquoi l’appelant ne bénéficie pas de la règle de la gradation des sanctions puisqu’il avait été sanctionné une seule fois antérieurement. […] Par ailleurs, il a droit à sa dernière chance. […] La nature même du droit disciplinaire et l’importance fondamentale du travail pour tout être humain commandent cette reconnaissance », conclut le jugement.

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